Par Admin

  « Le Courrier de l’Atlas », une publication qui s’intéresse au Maghreb et la France, a réservé ses pages sportives du numéro de décembre à l’histoire de Nayef Aguerd le nouveau futur patron de la défense des Lions de l’Atlas. Au delà du portrait, il s’agit d’un véritable hommage à l’ancien lauréat de l’Académie Mohamed VI. Nous publions ici quelques extraits de cet élogieux portrait.  

 

 Nayef Aguerd : Forte tête

 A 24 ans, le défenseur marocain s’affirme au Stade Rennais, avec qui il dispute la Ligue des champions. Une nouvelle étape dans une progression mûrement réfléchie.

 Ce n’est pas la première qualité que l’on demande à un défenseur, mais elle permet à quelques forçats des arrières-gardes de se donner un bref bain de lumière, avant de retourner exécuter leurs basses œuvres dans leur propre surface. A l’instar d’un Sergio Ramos, le Marocain Nayef Aguerd est un défenseur buteur. Arrivé au Stade Rennais en toute fin de préparation, au mois d’août, l’ex du FUS Rabat a ainsi déjà fait trembler les filets par trois fois en Ligue 1, cette saison, dont deux buts de la tête. Une efficacité qui fait même du défenseur central, le co-meilleur buteur du club breton. Mais quand on interroge ceux qu’ils l’ont connu, ce n’est pas le jeu de tête d’Aguerd qu’ils mettent instinctivement en avant, mais plutôt de qui se passe à l’intérieur à celle-ci. «Là haut, ça va très vite, comme le formule Hervé Renard, l’ex-sélectionneur des Lions de l’Atlas, et c’est d’ailleurs sa première qualité». «C’est un joueur extrêmement intelligent» abonde Nasser Larguet, l’ex Directeur Technique National du Maroc, qui lui avait fait intégrer l’Académie Mohamed VI dès ses 12 ans après l’avoir repéré lors d’un tournoi dans la banlieue de Rabat.

 La progression du défenseur est d’ailleurs celle d’un joueur réfléchi, qui ne brûle pas d’étapes, comme un élève studieux passe son bac -qu’Aguerd a obtenu avec mention- sans faire d’impasses. En 2014, après l’Académie Mohamed VI, c’est ainsi au FUS Rabat que le gaucher part terminer sa formation et débuter sa carrière, même si les Espagnols de Valence étaient intéressés par ses services. Dans un des rares clubs stables du royaume, Aguerd sera cornaqué par l’ex-défenseur des Lions de l’Atlas, Walid Regragui, pour qui miser sur de jeunes éléments tient lieu de politique. Aguerd ne pouvait pas mieux tomber : il s’épanouit, inscrit son premier but en championnat dès ses 18 ans, porte même le brassard de capitaine, et contribue au premier titre du champion du Maroc remporté par le FUS, en 2016. «Il n’avait que 20 ans et sa saison avait été remarquable» se souvient Hervé Renard, qui le fait alors débuter avec les Lions de l’Atlas. Le saut vers l’Europe ne se fera toutefois que deux ans plus tard, après avoir notamment remporté le Championnat d’Afrique des nations de football (ndlr : réservé aux footballeurs qui évoluent en Afrique), à domicile. «Cette expérience l’a fait grandir, estime Fouad Chafik, le latéral franco-marocain de Dijon, où Aguerd a fait ses débuts en Europe en 2018, car comme la compétition se jouait au Maroc il y avait énormément de pression». Quand il débarque en Côte d’Or sous les conseils de … Regragui, ancien du club, le gaucher est toutefois bien «frêle», dixit Chafik, pour faire le poids dans les duels musclés de Ligue 1. Mais l’échalas d’1,88m va rapidement se remplumer pour parvenir à se faire une place dans le onze titulaire. «Il a gagné en puissance, indique son ex-coéquipier, c’était son grand axe de progrès, car techniquement il a toujours été au-dessus».

 

 Au Stade Rennais, Aguerd a dû apprendre rapidement. Le lendemain de son arrivée au club, c’est ainsi en titulaire qu’il débutait le dernier match amical du Stade Rennais, à Nice (2-3), et qu’il inscrivait son premier but. A se fier à son CV, sa réussite dans un club qui joue la Coupe d’Europe n’avait toutefois rien d’une évidence alors qu’il n’avait disputé que 25 matches en deux saison de Ligue 1 à Dijon, un club qui lutte chaque année pour son maintien. «En fait, il a surtout été freiné par les blessures, renseigne Chafik, et pour moi depuis qu’il est à Rennes il a déjà franchi un nouveau palier». La pression de jouer les premiers rôles en Ligue 1 et de découvrir la Ligue des champions aurait toutefois pu l’inhiber. «Nayef arrive à beaucoup relativiser et cela lui permet de jouer libéré, poursuit son ex-coéquipier dijonnais, détenteur d’un master en économie du sport et du tourisme, son enfance n’a pas été facile et il est conscient de sa chance incroyable d’être footballeur professionnel». Dans le vestiaire, celui qui maîtrise quatre langues (arabe, français, anglais, espagnol) c’est aussi rapidement intégré. Car derrière l’élève appliqué, il y a un «vrai ambianceur et un grand rigolo», dixit Chafik. Un bon vivant aussi, amateur de cuisine française et indienne.

  Par Thomas Goubin